Des Vivants, de Raphaël Meltz, Louise Moaty et Simon Roussin, Prix Cases d’Histoire 2021
La Seconde Guerre mondiale fait toujours recette en bande dessinée. Bien souvent avec une croix gammée ou un portrait d’Hitler bien placés en couverture. Des Vivants épargne aux lecteurs ces clichés vendeurs pour se focaliser sur l’organisation des premiers réseaux de Résistance en France et plus particulièrement celui du Musée de l’Homme. L’album décrit avec précision la période qui court de 1940 à 1942, soit de la création à l’anéantissement du réseau. Les partis pris narratifs et graphiques du lauréat du Prix Cases d’Histoire 2021 lui donnent une valeur et une originalité qui en font une bande dessinée historique remarquable.
Le réseau du Musée de l’Homme, une des premières organisations spontanées de résistance à l’occupant en France, est très bien documenté. L’intérêt de Des Vivants ne tient donc pas dans une quelconque divulgation de faits inconnus, bien au contraire. Tout ce qui est dit dans l’album a déjà été écrit, dans des livres, des articles de journaux, des lettres, des procès-verbaux, des discours ou prononcé dans des entretiens radiophoniques. Aucun dialogue n’est inventé. Nous sommes là au plus près de la pensée des acteurs de ce drame. Toute l’habileté de Raphaël Meltz et Louise Moaty a été de créer un lien narratif entre ces fragments d’un corpus de textes colossal. Cette façon de faire est à la fois plus froide et plus poignante qu’un scénario classique. Plus froide car le matériau utilisé n’a bien évidemment pas été produit dans le but d’en faire une œuvre et peut parfois paraître moins souple qu’un dialogue parlé. Mais plus poignant car les mots sont exactement ceux des membres du réseau.
Des Vivants déroule donc le fil des deux années pendant lesquelles un certain nombre d’employés du Musée de l’Homme ont multiplié les actions de résistance, tout en restant à leur poste. Les risques étaient inouïs, la générosité totale, la solidarité sans réserve, la volonté chevillée au corps. Sans nul doute, 80 ans plus tard, cet épisode de courage collectif est toujours très inspirant. Des Vivants le décrit au plus près et ajoute avec les nombreuses notes en fin d’ouvrage un éclairage passionnant. Le style graphique de SImon Roussin offre à l’ensemble une atmosphère à part. Plutôt que de choisir des couleurs réalistes ou des teintes sépia pour représenter une action située dans le passé, le dessinateur utilise une palette très originale, reconnaissable au premier coup d’œil.
Tant au niveau du scénario que du dessin, Des Vivants est une belle réussite qui participe au renouvellement de la bande dessinée historique.
Pour mémoire, les deux autres finalistes étaient :
Les sept autres demi-finalistes étaient :
Fatty, Le premier roi d’Hollywood. Julien Frey et Nadar. Futuropolis
Entre-deux-guerres, Etats-Unis
Finnele T3. Anne Teuf. Delcourt
XXe siècle, Seconde Guerre mondiale, France
La chronique de Cases d’Histoire
Go West Young Man. Tiburce Oger et collectif. Grand Angle
XIXe siècle, Etats-Unis
Mademoiselle Baudelaire. Yslaire. Dupuis
XIXe siècle, France
Soleil mécanique. Lukas Wojciechowski. ça et là
Entre-deux-guerres, Seconde Guerre mondiale, Tchécoslovaquie
Sur un air de fado. Nicolas Barral. Dargaud
Second moitié XXe siècle, Portugal,
Le Tambour de la Moskova. Simon Spruyt. Le Lombard
XIXe siècle, Russie
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