Les Faucheurs de vent, la Grande Guerre vue du ciel
Le tome 3 des Faucheurs de vent conclut un triptyque ancré dans les forces aériennes naissantes pendant la Première Guerre mondiale. A travers une intrigue qui met aux prises des pilotes de chasse, Therry Lamy et Cédric Fernandez dressent le portrait d’une unité à part dans les armées des belligérants.
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L’une des (nombreuses) nouveautés militaires apparue pendant la Première Guerre mondiale est l’utilisation de l’aviation dans les forces armées. Jusque là invention récente – le premier vol motorisé des frères Wright date de 1903 – en cours d’amélioration, l’avion prend son envol avec le conflit mondial, la guerre étant comme toujours un formidable accélérateur technologique. D’abord balbutiant, l’intérêt tactique et stratégique de l’aviation ne fait qu’augmenter au cours de la Grande Guerre en réponse à des problématiques pas forcément décelées les années précédentes (les premières escadrilles sont en effet créées en France en 1912). Les missions de reconnaissance, les combats aériens, les bombardements, les photographies aériennes, les vols en formation, l’appui aérien des forces au sol, autant de particularités de l’utilisation des aéroplanes qui se mettent en place dans les premiers mois de la guerre. La trilogie des Faucheurs de vent commence en 1917, à une période où l’aviation a pris une place non négligeable dans la conduite des combats, même si elle n’est pas encore une arme à part entière (l’armée de l’air est en effet créée en 1934). Venant de l’aviation d’observation, le sergent Laffitte est versé dans l’escadrille des faucheurs, vouée à la chasse. Il rejoint notamment le lieutenant Marais, un officier d’infanterie passé quelques mois plus tôt dans l’aviation. Une mutation assez courante à l’époque, demandée notamment par les officiers de cavalerie, devenus rapidement inutiles avec la généralisation de la guerre de tranchées.
Cet afflux de cavaliers dans l’aviation amplifie chez les pilotes le sentiment d’appartenir à une élite militaire. A cette notion « d’aristocratie » aérienne s’ajoute chez certains la volonté de combattre de manière chevaleresque dans les airs. Comme pour Le Pilote à l’Edelweiss (un triptyque antérieur réalisé par Yann et Romain Hugault en 2012-2013), les trois tomes des Faucheurs de vent intègrent ces deux caractéristiques dans leur intrigue. Le classique et fameux duel aérien entre un as français et son homologue allemand y tient une place de choix. Le fil rouge du récit, une vengeance familiale un peu alambiquée, n’est pas le point fort de la série. Finalement, c’est tout l’arrière-plan historique qui donne sa saveur aux Faucheurs de vent. Les noms des aéroplanes (Nieuport, Dorand, Voisin, SPAD côté français, Gotha côté allemand) fleurent bon les débuts de l’aviation militaire. Les Zeppelins et les ballons d’observation rappellent une époque révolue où les dirigeables avaient encore un avenir. Les insignes personnels peints sur les carlingues, l’avion porte-poisse, l’homologation ds victoires et les mécanos ingénieux illustrent le quotidien des pilotes. Des détails méconnus (les bombardements aériens d’Amiens et de Dunkerque, l’attaque des tranchées par des avions) éclairent le déroulemet du conflit. Mais les ingrédients les plus délectables de la description des forces aériennes sont certainement ces expressions inventées pendant la Grande Guerre, saupoudrées au fil des albums. Le plaisir de découvrir la signification de la boîte à dominos, de la panne-château et du pingouin, ou de savoir ce que veut dire gagner le coquetier et se faire crapouiller est une friandise supplémentaire dans la lecture des Faucheurs de vent.
Les Faucheur de vent T3 Combat de chiens. Thierry Lamy (scénario). Cédric Fernandez (dessin). Glénat. 48 pages. 13,90 €
Les 5 premières pages :