En songeant à la place qu’Alésia occupe dans notre imaginaire, à la légende qui accompagne Vercingétorix (sa résistance à l’envahisseur, puis sa glorieuse défaite en Bourgogne), on pouvait imaginer que cette bataille avait constitué la trame principale de nombreuses bandes dessinées. Force est de constater que peu d’albums se sont emparés du sujet, mais ils se distinguent par une qualité souvent remarquable et une volonté pédagogique affirmée. Tour d’horizon.

Cette chronique est la quatrième d’une série de dix sur les bandes dessinées dont l’action se situe pendant l’Antiquité romaine. Elle s’inscrit dans les événements organisés en 2022 pour les dix ans du Muséoparc Alésia. Elle est publiée sur et sur 


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A tout seigneur tout honneur, intéressons-nous d’abord à Astérix. Pour constater que les auteurs de la série ne se sont pas aventurés sur ce terrain puisque les aventures du petit Gaulois se situent après la reddition d’Alésia (“Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ, toute la Gaule est occupée par les Romains“), mais René Goscinny a tout de même évoqué l’oppidum gaulois dans Le Bouclier Arverne sur le ton de la plaisanterie (voir image de couverture), pour répondre ou plutôt pour jouer avec la fausse polémique sur l’emplacement de la bataille. A noter que les nouveaux auteurs de la série ont quant à eux évoqué La fille de Vercingétorix.

La série Vae Victis dessinée par Jean-Yves Mitton et scénarisée par Simon Rocca (éditions Soleil, entre 1991 et 2006) a tout de la grande saga. Prenante, bien racontée, elle met en scène une jeune esclave celte à Rome au moment de la Guerre des Gaules. Ambre n’a qu’une idée en tête, faire la nique aux Romains et surtout les empêcher de conquérir le monde. L’entreprise est ambitieuse. La longueur de la série et les rebondissements de l’histoire conduisent la jeune femme à fréquenter les Romains les plus glorieux de l’époque : César et Pompée. C’est ainsi qu’elle découvre le projet de conquête de la Gaule. Dans le dernier volume, Ambre à Alésia, elle se retrouve à la tête d’une petite armée gauloise qui se joint à celle de Vercingétorix. Malgré des rebondissements à foison, la série tient ses promesses aussi bien dans la tenue de l’intrigue que dans le respect des contraintes historiques. Le dessin est un peu daté mais on s’y replonge avec délices tant le plaisir du dessinateur à croquer Gaulois, Romains et batailles sanglantes est patent. En 2017, l’intégrale de Vae Victis a été rééditée en 3 gros volumes.

Plébiscité par de nombreux chercheurs, Alésia, l’alliance brisée raconte le siège, la bataille et la vie dans les camps romains comme dans l’oppidum assiégé. Publié en 2011 par les éditions AssorHistoire, dessiné par Jean-Marie Michaud, scénarisé par Eriamel et Serge Mogère, cet album nous emporte par une immersion totale dans l’époque et l’évènement. Partant du texte de César, l’éclairant par les découvertes archéologiques et anthropologiques, les auteurs donnent une réelle leçon d’Histoire. Le cahier historique est d’ailleurs rédigé par des spécialistes de haut vol et il apporte un éclairage intéressant en comparant des documents historiques et des cases de l’album pour montrer au lecteur comment l’Histoire peut devenir bande dessinée. Petit bémol, le dessin, si il est historiquement parfait est souvent maladroit. Cet album est complété par un volume sur Gergovie. A noter que le même éditeur a sorti en 2020 un nouvel opus sur le même thème Alésia : l’ultime espoir.

Impossible de passer à côté du volume Alésia de la série des “Voyages d’Alix” publiés par les éditions Casterman et dessinés par des continuateurs de l’œuvre originale. On est loin des chefs d’œuvres produit par Jacques Martin, le trait est plus figé, plus statique et l’histoire ne possède pas le souffle des meilleurs volumes d’Alix mais le but de la série est avant tout de faire découvrir aux jeunes lecteurs des grands monuments ou des lieux mythiques de l’Antiquité. C’est plutôt réussi.

Vercingétorix, raconté et dessiné par Jacques Martin lui même est d’une autre facture. Publié en 1985 par Casterman, cette aventure d’Alix est palpitante, passionnante et à la fois un peu délirante. Le chef gaulois a été enlevé par Pompée qui veut priver César de son triomphe ? Il réussit à retourner Alix qui accepte de tremper dans la forfaiture. César se lance à la poursuite des fugitifs pour récupérer son trophée. Une cavalcade infernale commence…

Dernière recommandation, Vercingétorix, album coédité par les éditions Glénat et Fayard, scénarisée par Eric Adam, Didier Convard et Stéphane Bourdin, dessiné par Fred Vignaux. Le principe de la collection “Ils ont fait l’histoire” est d’associer des auteurs (scénaristes et dessinateurs) chevronnés à des historiens spécialistes de la période. Ce Vercingétorix est un des meilleurs de toute la série. Historiquement irréprochable, il est aussi bien écrit. L’histoire et l’Histoire y font bon ménage. Le dessin est dynamique et plonge les lecteurs au cœur de l’action. Les personnages et surtout les visages sont convaincants ce qui n’est pas toujours le cas pour des albums cités plus haut.


Astérix T11 Le Bouclier arverne. René Goscinny (scénario). Albert Uderzo (dessin). Hachette. 48 pages. 10,50 euros.


Astérix T38 La Fille de Vercingétorix. Jean-Yves Ferri (scénario). Didier Conrad (dessin). Hachette. 48 pages. 10,50 euros.


Vae Victis T15 Ambre à Alésia. Simon Rocca (scénario). Jean-Yves Mitton (dessin). Chantal Chéret (couleurs). Soleil. 46 pages. 14,95 euros.


Alésia, l’alliance brisée. Eriamel et Serge Mogère (scénario). Jean-Marie Michaud (dessin). YSEC. 104 pages. 19,50 euros.


Alix T18 Vercingétorix. Jacques Martin (scénario et dessin). Michel Dubois (couleurs). Casterman. 48 pages. 12,50 euros.


Vercingétorix. Didier Convard et Eric Adam (scénario). Stéphane Bourdin (dessin). Glénat. 58 pages. 14,95 euros.