Marie-Antoinette bodybuildée, la contre-Révolution à la japonaise avec Power Antoinette
Même si personne ne s’étonnera que Marie-Antoinette soit le personnage central d’un manga, Akinosuke Nishiyama et Shima lui donnent avec Power Antoinette l’image d’une reine championne d’arts martiaux et haltérophile testostéronée. Une incarnation pour le moins inattendue, pour ne pas dire stupéfiante.
Certes, depuis le succès mondial de La Rose de Versailles de Riyoko Ikeda, en 1972, et son exploitation télévisée Lady Oscar, Marie-Antoinette est devenue, comme Charlotte Corday, une des héroïnes fétiches des mangas. Depuis cinquante ans, elle évolue dans un milieu androgyne, rencontrant des jeunes femmes habillées en homme, qui sont des figures positives, les figures négatives étant des hommes faibles habillées en femme ou des brutes viriles destinées à être balayées.
Ce schéma ordinaire est repris dans ce manga tout en étant bousculé dès la deuxième page quand, après l’inévitable prise de la Bastille et la très convenue guillotine, on voit Marie-Antoinette, le jour de son exécution, poser à terre précautionneusement les haltères – de 20 à 30 kilos pièce – qu’elle avait en main avant de sortir de la prison de la Conciergerie. A son arrivée sur l’échafaud, elle est heurtée par le bourreau, Charles-Henri Sanson, portant robe, cape et ayant une barrette fleur dans les cheveux, qui appuie par inadvertance sur un point d’acupuncture ce qui la métamorphose en superwoman.
Cette transformation lui permet de s’opposer à la chute de la lame de la guillotine qui n’est guère plus qu’une « barre de développé couché » ! On comprend ici l’intérêt d’avoir couché la reine sur le dos, contrairement à l’habitude de mettre le condamné sur le ventre, la tête au-dessus du panier. Cette position – celle de la gymnaste habituée aux salles de sport – renverse littéralement les rôles, puisque la reine fait exploser la guillotine et tous ceux qui l’entourent, à l’exception du bourreau homme-femme timide et maladroit.e.
La reine mesure désormais 1,80 m et son « opulente poitrine » est remplacée par de « puissants pectoraux » ; elle proclame que c’est avec elle que la France commence et qu’elle va « tout recouvrir de muscle » avant d’entreprendre de libérer ses enfants emprisonnés.
C’est avec l’aide de la couturière Rose Bertin, au style particulier, et du chevalier/chevalière d’Eon que la reine retrouve sa fille, avant que le volume se clôture sur les retrouvailles avec le dauphin ; tous les hommes trouvés sur le parcours ayant été éliminés d’une façon ou d’une autre. On goûtera à sa guise cette interprétation très libre de la reine bodybuildée.
Power Antoinette T1. Akinosuke Nishiyama (scénario). Shima (dessin). Misei Ito (character design). Doki Doki. 194 pages. 7,95 euros