Léonard de Vinci, génie absolu de la Renaissance, dévoilé dans toute sa dimension
Peintre, sculpteur, architecte, ingénieur, philosophe, anatomiste, botaniste, urbaniste… Léonard de Vinci était tout, à une époque où les arts et les sciences connaissaient enfin un fort renouveau en Occident. Marwan Kahil et Ariel Vittori se sont plongés dans la vie de ce créateur insatiable, de cet inventeur-né, de celui qui symbolise à lui seul l’âme de la Renaissance.
Alors que l’on commémore cette année le 500e anniversaire de la mort de Léonard de Vinci (1452-1519), force est de constater que l’événement n’a pas suscité outre-mesure l’agitation éditoriale à laquelle on pouvait s’attendre, notamment en ce qui concerne le secteur de la bande dessinée. Parmi les albums parus durant cette année particulière figure la biographique signée Marwan Kahil et Ariel Vittori chez 21g, un éditeur spécialisé dans la publication de biopics en BD. Sous-titré La Renaissance du Monde, l’album retrace le parcours du génie toscan, de sa naissance dans le village de Vinci, à 25 kilomètres à l’ouest de Florence, jusqu’à ses dernières années, passées en France, sous la protection du roi François Ier.
S’ils ne parviennent pas à revenir en détails sur tous les aspects de la vie du créateur – mission impossible dans un tel format –, les deux auteurs s’attardent néanmoins sur certains épisodes cruciaux, comme son entrée dans la bottega de Verrocchio. Cet artiste florentin a très vite pris conscience du talent immense de son apprenti. Au lieu d’en prendre ombrage, il l’a orienté durant les premières années de sa longue carrière. Plus tard, on découvre Léonard de Vinci entrant au service de Ludovic Sforza, le duc de Milan. A partir de 1482, il peint plusieurs portraits de nobles lombards, et réalise également le moule en argile d’une imposante statue équestre. Elle ne verra jamais le jour, en raison de la conquête du duché de Milan par le roi de France Louis XII, en 1499.
Contemporain de Cesare Borgia et de Nicolas Machiavel, qu’il côtoie à Rome, Léonard de Vinci retourne finalement à Florence en 1503, accompagné de son assistant Salaï. Outre la peinture, il y devient ingénieur de guerre – c’est à cette époque qu’il dessine les prototypes de la plupart de ses armes –, mais aussi architecte. C’est aussi en Toscane qu’il commence le tableau le plus connu du monde : La Joconde. Plus tard, après la bataille de Marignan, il rencontre François Ier, qui lui propose sa protection et un lieu calme pour travailler. Intitulée Au service du roy de France, la quatrième partie de cette biographie couvre justement cet épisode.
Inclus dans la sélection « Viva Leonardo Da Vinci 2019 », de la région Centre-Val de Loire, Léonard de Vinci – La Renaissance du monde évolue toujours à proximité de son sujet, ce qui constitue l’une des forces de l’ouvrage. Tout passe par son regard, les moments d’aparté ou plus explicatifs étant réduits au stricte nécessaire, pour la bonne compréhension des différents enjeux. L’approche de Marwan Kahil et d’Ariel Vittori sort également des sentiers battus. Exit la biographie centrée sur La Joconde, L’Homme de Vitruve, et La Cène. L’œuvre de Léonard de Vinci ne se limite pas à ce que le tourisme culturel veut aujourd’hui bien en faire, c’est-à-dire un produit marketing. Les auteurs abordent également les faiblesses du génie de la Renaissance, qui semble parfois avoir vécu en marge de la société. Son statut de bâtard est un handicap à ses débuts, tandis que son orientation sexuelle aurait pu lui coûter cher. De Vinci avait également tendance à travailler en dilettante, et à ne pas terminer ses projets. Il avait par ailleurs des problèmes financiers récurrents.
« Dans cet ouvrage, nous avons voulu évoquer les obstacles qu’a connu Léonard de Vinci, les aspects méconnus de son parcours, les discriminations qu’il a eu à subir du fait de son homosexualité, et dans le même temps présenter l’apport de son génie, ses réflexions, sa pensée, ses réalisations, son humour, ses désillusions », explique le scénariste Marwan Kahil. « Tout cela montre les enjeux historiques de son époque, ainsi que le rôle de ses mécènes, dont le plus prestigieux est le roi de France, François Ier. Il est le seul à lui offrir, un peu tardivement, les moyens et le confort de se réaliser. Il l’inscrit définitivement dans la légende ».
Côté dessin, il faut noter l’intéressante performance de l’autrice italienne Ariel Vittori. Évoquant – sans la singer – la peinture de la Renaissance, elle parvient à donner une véritable patte graphique à cet album. Si le trait gras en titillera peut-être certains et si le rendu est parfois inégal selon les planches, cette approche a quelque chose de captivant, renforcé par une mise en couleur réussie. Précisons que cet album est complété par un dossier historique pertinent, où l’on revient notamment plus en détails sur certaines œuvres évoquées tout au long du récit. Cet ouvrage a déjà remporté un certain succès en France et même à l’étranger, puisqu’il est d’ores et déjà disponible en castillan (chez Norma), en russe (version éditée par Bombora) et sera prochainement traduit en anglais par l’éditeur new-yorkais NBM. Marwan Kahil sera, lui, en tournée jusqu’à la fin du mois de décembre. Il sera notamment en dédicaces au festival BD Boum, à Blois, les vendredi 22, samedi 23, et dimanche 24 novembre. Il présentera également son livre à la bibliothèque Oscar Wilde, à Paris (20e arr.), le samedi 30 novembre.
Léonard de Vinci – La Renaissance du monde. Marwan Kahil (scénario). Ariel Vittori (dessin). 21g. 128 pages. 20 euros.
Les 5 premières planches :