Les Amérindiens s’exposent dans le berceau des Canadiens français
Jusqu’au 28 octobre a lieu à Tourouvre, dans l’Orne, une exposition sur “Les Indiens du Canada dans la bande dessinée”. Avec comme fer de lance Plume aux vents, la série en quatre tomes de Patrick Cothias et André Juillard. L’occasion de mettre un coup de projecteur sur des tribus indiennes bien moins traitée par le 9e art que celles des grandes plaines américaines.
Au cinéma comme en bande dessinée, les Indiens des plaines ont la grosse cote. Sioux, Cheyennes, Comanches, Crows, Shoshones et bien d’autres encore ont embrasé l’imagination des auteurs. Les Premières nations du Canada, qui ont pourtant une belle place dans l’imaginaire collectif avec les Iroquois, Hurons, Algonquins et autres Agniers (Maquas en néerlandais, Mohawks en anglais), sont moins représentés. L’une des séries qui en a le plus parlé est certainement Plume aux vents, réalisée par Patrick Cothias et André Juillard comme une suite chronologique à Cœur brûlé, autre saga incluse dans le cycle des 7 Vies de l’épervier. L’accrochage de planches originales de cette aventure en quatre tomes forme le point d’ancrage de l’exposition “Les Indiens du Canada dans la bande dessinée”, dont Cases d’Histoire est partenaire. Et il est vrai que les péripéties vécues par Ariane de Troïl lors de son passage dans le Nouveau Monde permettent au lecteur de s’immerger dans un mode de vie bien différent de celui des Indiens des plaines. Ici, pas de tipis et de chasse aux bisons, mais des villages de huttes et de l’agriculture. Une découverte autant pour l’héroïne que pour le grand public.
L’intérêt de l’exposition est également de mettre en valeur le moyen de locomotion majeur des Indiens de la région du Québec actuel : le canoë. Dans une civilisation qui ne connait pas le cheval, c’est en effet le mode de transport le plus efficace, tant pour naviguer sur les fleuves et rivières que pour affronter la force de l’estuaire du Saint-Laurent. Les premiers colons français ne s’y sont pas trompés, qui ont adopté rapidement cette embarcation pour se déplacer dans ces immenses étendues tellement riches d’animaux à fourrure. La reconstitution d’un de ces canoës trône donc en bonne place dans la salle d’exposition. Pour accompagner Plume aux vents dans cet hommage à l’ingéniosité des Amérindiens, quelques reproductions d’œuvres d’auteurs familiers avec les Indiens du Canada : Capitaine perdu de Jacques Terpant, Les Pionniers du Nouveau Monde de Maryse et Jean-François Charles, L’Art-Book Cromwell quelque part…, et Iroquois de Patrick Prugne (album à paraître fin août, dont nous vous proposons à la lecture les premières pages).
Que l’exposition ait lieu à Tourouvre, petite ville à mi-chemin entre Dreux et Alençon, n’est pas le fait du hasard. Le bourg est en effet le principal point de départ des premiers colons français en partance pour Québec. En 1634, un certain Robert Giffard embarque avec femme et enfants et une trentaine de compagnons originaires du Perche pour le fortin par Samuel de Champlain. A la mort de ce dernier l’année suivante, la population de l’abitation de Québec se monte à 132 personnes dont 1/4 venant Tourouvre et Mortagne. On imagine le poids de cette origine géographique dans l’arbre généalogique des Québécois d’aujourd’hui. La création de la Maison de l’Emigration française au Canada en 2004 à Tourouvre parait donc tout à fait cohérent avec le passé de la petite ville. L’organisation de l’exposition “Les Indiens du Canada dans la bande dessinée” dans ce lieu répond à la même logique.