Reine d’Égypte t.1 : une femme pour pharaon
Déjà présentes sur le créneau du manga historique avec, par exemple, Ad astra ou Cesare, les éditions Ki-oon viennent de lancer une série prenant pour cadre l’Égypte antique, plus précisément l’époque du règne d’Hatchepsout, au IIe millénaire avant notre ère.
Son nom ne vous est certainement pas étranger. Hatchepsout a régné sur l’Égypte au milieu du IIe millénaire avant notre ère. Si elle a laissé son nom dans les annales, c’est non seulement pour ses talents de chef d’état, mais également parce qu’elle est la première femme connue à avoir marqué l’Histoire. Fille aînée de Thoutmôsis Ier et de la grande épouse royale Ahmès, Hatchepsout est promise à un grande destin. Selon certaines sources, son père envisage même de lui confier les rênes de l’empire. Il suit de près son éducation et l’emmène avec lui lors de ses campagnes militaires. Mais à la mort de Thoutmôsis Ier, la tradition est respectée et c’est l’un de ses fils, Thoutmôsis II, qui monte sur le trône. Ce dernier est par ailleurs le demi-frère et époux d’Hatchepsout.
De santé fragile, Thoutmôsis II décède au bout de quelques années de règne, ce qui propulse le tout jeune Thoutmôsis III – environ cinq ans – à la tête de la première puissance méditerranéenne de l’époque. Nous sommes vers 1478 av. J.-C. ; Hatchepsout devient régente et dirige alors le pays aux côtés de son beau-fils (Thoutmôsis III a pour mère Iset). Par la suite, elle est couronnée reine d’Égypte et devient l’égale du pharaon. Ce qui semblait jusqu’alors impossible arrive : Hatchepsout devient la première reine-pharaon. Et par la même occasion, sans aucun doute, la première femme chef état.
Dans Reine d’Égypte, la jeune Hatchepsout est belle, intelligente, et aussi habile en politique qu’à l’épée. Elle a toutes les qualités requises pour succéder à son père sur le trône d’Égypte. Mais Hatchepsout est une femme. En tant que telle, elle est légalement condamnée à ne jouer qu’un rôle subalterne, car seul un homme peut porter le pschent, la double-couronne des pharaons. En apparence résignée, Hatchepsout accepte d’épouser son demi-frère Séthi, qui devient dès lors l’héritier du trône sous le nom de Thoutmôsis II. Lorsque celui-ci accède au trône, la jeune femme ne se contente pourtant pas de sa vie passive. Elle rêve de donner une nouvelle dimension à son rôle de reine. Et, pourquoi pas, d’exercer un jour le pouvoir directement.
Saluons tout d’abord l’originalité de ce manga, qui traite d’un sujet – l’Égypte antique – finalement assez peu abordé en bande dessinée. Le contexte historique est, par certains aspects – nom des personnages, déroulement des événements –, relativement fidèle à ce qui est connu de la biographie d’Hatchepsout. Chie Inudoh livre en revanche une analyse très contemporaine de la célèbre reine-pharaon. C’est d’ailleurs à la fois la qualité et le principal défaut de ce récit, dont la rigueur historique devient dès lors plus qu’aléatoire. Si la démarche pédagogique est évidente, le ton général est assez naïf, que ce soit lorsque Hatchepsout tente de s’affranchir des coutumes de son pays, ou lorsque qu’un scribe répond effrontément à sa souveraine sans que celle-ci n’y trouve rien à redire.
Graphiquement, la jeune mangaka livre un premier tome riche en détails même si, là aussi, on a du mal à être convaincu par les impressionnantes – et inutiles – tablettes de chocolat des guerriers égyptiens. Le rythme de narration est quant à lui plutôt élevé, et les dialogues de bonne facture. Ce récit est donc à lire comme une jolie parabole, mais aucunement comme livrant une vérité historique. Car faire d’Hatchepsout une suffragette avant l’heure est décidément une idée aussi étrange qu’anachronique.
A noter que Chie Inudoh sera exceptionnellement en dédicaces au Salon du livre de Paris les 24, 25, et 26 mars.
Reine d’Égypte t.1. Chie Inudoh (scénario et dessin). Ki-oon. 200 pages. 7,90 €
Les 5 premières planches :
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