Et le prochain président des Etats-Unis est…
La Maison Blanche, le dernier “manuel” en date réalisé par Hervé Bourhis, n’est pas une boule de cristal. Bien malin.e celui ou celle qui à sa lecture parviendra à prévoir l’identité du prochain président des Etats-Unis. Mais cette Histoire illustrée des présidents des USA de George Washington à Donald Trump, comme est sous-titré l’album, dresse un panorama de presque 250 ans de politique états-unienne qui confirme que pour l’élection du POTUS, tout est possible, le meilleur comme le pire.
Hervé Bourhis est coutumier du fait. Ce genre de manuel en images, le dessinateur de bande dessinée en a fait sa marque de fabrique. Après Le Petit Livre rock (2007), Le Petit Livre Beatles (2010), Le Petit Livre de la Cinquième République (2011), Le Petit Livre de la bande dessinée (2014), Le Petit Livre black music (2016), et Le Petit Livre french pop (2018), le voila qui s’attaque aux locataires successifs de la Maison blanche, élections américaines obligent. Le principe de ces ouvrages est immuable : le lecteur remonte le fil chronologique du sujet, en s’arrêtant sur une année ou une thématique. Chaque page est composée de petites pastilles illustrées, expliquant en deux ou trois phrases un détail important ou significatif. L’idée est de réaliser une description globale impressionniste, en allant à l’essentiel, sans multiplier les couches d’informations. Comme une fiche de lecture qui utiliserait astucieusement la mémoire visuelle.
La Maison blanche reprend grossièrement le modèle de l’opus sur la Cinquième République en le modifiant (45 POTUS – President Of The United States – contre 6 présidents de la République française – à la sortie du livre). Chaque présentation comprend un portrait auquel s’ajoutent une ou plusieurs pages (suivant le nombre de mandats) qui donnent la substantifique moelle de chaque quadriennat. Dès la page du portrait du président, les pictogrammes donnent une couleur ludique à l’ouvrage : une médaille s’il a obtenu le prix Nobel, une tête de mort s’il a été assassiné, un sens interdit s’il a subi un impeachment, un Mont Rushmore si son visage y est sculpté, etc.
La page suivante présente un CV succinct avec l’âge du président à son élection, son parti, ses convictions religieuses, ses métiers, etc. Vient ensuite un court portrait de la FLOTUS (First Lady Of The United States) puis du ou des vice-présidents. Ces détails ne sont pas aussi anodins qu’on pourrait le penser, et on apprend souvent beaucoup ainsi sur la tonalité d’un mandat. Suivent alors les faits saillants de chaque mandature, brossant (forcément) à gros traits les hommes et leurs actes, ainsi que certains repères (les nouveaux Etats dans l’Union, les guerres menées, les billets sur lesquels apparaissent tel ou tel président ou l’évolution graphique du drapeau). Pour autant, ces speed datings avec les présidents américains sont assez édifiants. Outre le fait d’apprendre le nom de présidents tombés dans l’oubli de ce côté de l’Atlantique (de 1841 à 1857 se succèdent John Tyler, James Knox Polk, Zachary Taylor, Millard Fillmore et Franklin Pierce, qui ne laissent pas grand chose à la postérité, et dessinent en creux la silhouette d’un pays dont l’influence est alors plus que balbutiante), La Maison blanche esquisse une peinture de chaque époque et restitue l’empreinte politique de chacun des 45 présidents.
On regrettera le fait que La Maison blanche se borne à décrire les mandats les uns après les autres sans véritablement mettre en exergue des évolutions, des tendances, des jalons, comme si les quadriennats n’avaient pas de liens entre eux. Il manque certainement cette dose d’analyse pour étoffer un peu plus l’album. De manière plus anecdotique, on pourra aussi regretter qu’un certain nombre de portraits ne correspondent pas au moment de la prise de fonction (tous ont été réalisés à partir de la première photo de la page wikipédia en anglais, qui ne se rapporte pas forcément à l’apparence du président lors de son arrivée dans la Maison blanche).
Reste que l’album est une porte d’entrée idéale pour qui veut se plonger dans l’Histoire des présidents états-uniens (et même briller en société tant le volume regorge d’anecdotes). Le texte court irrigué par l’humour délicat d’Hervé Bourhis rend la lecture fluide et claire. La Maison blanche donne sans aucun doute envie d’approfondir la question – ce qui est le signe des ouvrages de vulgarisation réussis – en attendant l’élection d’un 46e présidents des Etats-Unis.
La Maison blanche. Hervé Bourhis (scénario et dessin). Casterman. 156 pages. 22 euros.
Les 5 premières planches :