Prix Cases d’Histoire 2024, les 10 meilleures BD historiques de l’année

Comme chaque année depuis 2015, le Prix Cases d’Histoire récompense la meilleure bande dessinée historique de l’année écoulée. Dans un premier temps, dix demi-finalistes choisis par la rédaction du site entrent en lice pour postuler au titre. La période contemporaine est une nouvelle fois la mieux représentée dans ce top 10, avec la Seconde Guerre mondiale comme fer de lance.

Années après années, l’attrait des autrices et des auteurs pour la Seconde Guerre mondiale ne se dément pas. Ce moment hors normes de l’Histoire mondiale, bien connu du grand public et qui a largement concerné l’espace franco-belge, est une source inépuisable d’inspiration. Pour 2024, pas moins de la moitié des albums retenus par la rédaction du site Cases d’Histoire comme les meilleures bandes dessinées historiques de l’année concerne le second conflit mondial. Habituée du palmarès, puisque les deux premiers tomes ont été sélectionnés dans le top 10 en 2021 et 2023, la série Madeleine résistante est une fois de plus présente en demi-finale avec un tome 3 aussi remarquable que ses prédécesseurs. Le décès de Madeleine Riffaud le 6 novembre dernier, donne à cette troisième nomination une tonalité particulière. Cette femme admirable qui a eu l’élégance ultime de fêter son centenaire avant de nous quitter, aura été à l’origine, par la transmission de son témoignage à Jean-David Morvan et Dominique Bertail, d’une série de bandes dessinées qui fait date dans l’Histoire du 9e art.

Quatre autres albums situent leur récit pendant la Seconde Guerre mondiale. Luz imagine avec Deux Filles nues à quoi les deux personnages féminins peints par Otto Mueller ont pu assister depuis leur cadre en bois. Réalisé en 1919, le tableau du peintre expressionniste est au cœur de la montée du nazisme et rapidement l’enjeu d’une idéologie qui voit l’art comme un ennemi potentiel. A travers les scènes qui se déroulent face à la toile, c’est en quelque sorte l’âme humaine qui est disséquée. Il en est de même pour Retour à Lemberg, de Christophe Picaud et Jean-Christophe Camus, d’après le livre de Philippe Sands. L’intrigue de l’album se situe à Lviv (Lemberg en allemand) où le grand-père de Sands a vécu avant d’échapper, contrairement au reste de sa famille, à l’extermination dans les camps. Où deux juristes juifs ont fait leurs études, avant de se retrouver au procès de Nuremberg. Et où un haut dignitaire nazi annonce en 1942 la mise en place de la solution finale. Trois fils narratifs qui s’entremêlent avec virtuosité, sur fond de tragédie. Le Lierre et l’araignée est aussi le fruit d’une recherche sur un chemin de vie réel, celui du grand-père de l’auteur, Grégoire Carlé. A travers l’album, le voile se lève sur la résistance en Alsace pendant la Seconde Guerre mondiale. Avec Lebensborn, Isabelle Maroger lève également le lièvre d’un secret de famille en se penchant sur la vie de sa grand-mère norvégienne, dont les amours avec un soldat allemand ont abouti à la naissance de la mère de l’autrice dans une pouponnière nazie.

Au delà de la Seconde Guerre mondiale, le XXe siècle se taille la part du lion de ce classement, avec quatre autres albums situés au siècle dernier. Bobigny 1972, de Marie Bardiaux Vaïente et Carole Maurel retrace le procès de Marie-Claire Chevalier jugée pour avoir avorté après un viol. L’éloquence de Gisèle Halimi, son avocate, l’influence de Simone de Beauvoir et le courage de toutes les femmes concernées traversent l’album jusqu’à la relaxe de la jeune femme et de sa mère, prélude à la loi de 1975 qui dépénalisera l’avortement. Le Dernier debout, d’Adrian Matjeka et Youssef Daoudi, aborde un autre type d’oppression avec la vie du boxeur Jack Johnson. A travers lui transparaît l’Histoire de la ségrégation raciale aux États-Unis. Lui le champion noir invincible, aura toutes les peines à combattre contre des blancs pour être champion du monde. La color line empêche en effet que deux boxeurs à la couleur de peau différente s’affrontent. Il réussira tout de même à vaincre Jim Jeffreys lors du combat du siècle en 1910. Ce fait de gloire sera le début de sa chute.

Quant à L’Intranquille Monsieur Pessoa, de Nicolas Barral, il narre les derniers jours du poète portugais en novembre 1935. L’auteur déroule la vie de l’écrivain par l’intermédiaire d’un jeune journaliste qui prépare la nécrologie de celui qui bouscule la littérature lusitanienne. Une évocation toute en finesse de Nicolas Barral, qui nous avait déjà enchanté avec Sur un air de fado. A cheval lui aussi entre le XIXe et le XXe siècle, le tome 2 de Mauvaise réputation, d’Antoine Ozanam et Emmanuel Bazin, prend place aux États-Unis pour relater la vie d’un des frères Dalton. Ce western crépusculaire fait le pont entre l’époque du Far West pendant laquelle le gang Dalton a attaqué banques et trains, et la modernité du siècle nouveau. En 1922, le film sur la vie des quatre frères est un succès, mais Emmett, le seul survivant, n’apprécie pas la manière dont Hollywood présente les faits. A l’automne de sa vie, il va tout faire pour dire sa vérité.

En 2024, les meilleures bandes dessinées historiques parlent donc du XXe siècle. Une seule s’en détache, mais de quelques années seulement. Le Combat d’Henry Fleming, de Steve Cuzor, se déroule en effet pendant la Guerre de Sécession. Le jeune Henry Fleming s’engage dans l’armée nordiste, mais son enthousiasme est rapidement mis à mal. L’absurdité de la guerre lui apparaît soudainement, alors que la première bataille à laquelle il va participer approche. Adaptation libre de The Red Badge of Courage, de Stephen Crane, publié en 1895, Le Combat d’Henry Fleming est une réflexion à hauteur de soldat sur le bien-fondé d’une guerre.

Rendez-vous entre Noël et le Jour de l’An pour le dévoilement des trois finalistes.