Avec Les Sentinelles, les poilus “augmentés” investissent la Grande Guerre
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Non, le personnage du super-héros n’est pas né aux Etats-Unis en 1938 avec Superman. Son origine est bien antérieure et située en France. Le grand public a quasiment oublié aujourd’hui les Judex, Nyctalope, Félifax, et autres Vega Ortega. C’est à cette création romanesque que se réfère Xavier Dorison en introduisant des personnages principaux hors du commun sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale. Pas de super pouvoirs chez ces hommes, mais des capacités surhumaines apportées par la technologie de l’époque. On est ici dans le registre d’Iron Man ou de Robocop, avec des corps modifiés (membres métalliques qui obéissent au doigt et à l’œil) et des engins mécaniques sur mesure (ailerons d’acier et réacteur portatif) pour les membres des Sentinelles, une unité secrète de l’armée française regroupant les quelques militaires ayant accepté d’être « augmentés ». Grâce à la mise au point d’une pile au radium, suivant les travaux de Pierre et Marie Curie, l’autonomie des batteries n’est plus un souci. Ces « armes » d’une nouvelle ère peuvent enfin aller sur le front prêter main forte aux troupes lancées à l’assaut de l’ennemi allemand. Dès août 1914, les Sentinelles font parler d’elles. On les retrouve pendant la bataille de la Marne puis à Ypres, où ils ont la très désagréable surprise de découvrir l’utilisation des gaz et l’existence d’un übermensch tout aussi redoutable qu’eux dans le camp d’en face. Leurs hauts faits, habilement relayés par le haut commandement, donnent toutefois du baume au cœur à leurs compatriotes, qui voient en eux des héros capables de faire basculer la guerre.
Dans ce quatrième volume qui se déroule en mai 1915, l’action se déplace sur un autre champ de bataille, celui des Balkans. Le combat entre l’Empire ottoman, allié de l’Allemagne, et les troupes franco-britanniques se cristallise dans les Dardanelles, précisément sur la péninsule de Gallipoli. La région est en effet stratégique pour les communications entre les trois nations de la Triple-Entente, France, Royaume Uni et Russie. Après avoir vainement essayé de passer en force à travers le détroit des Dardanelles, les Britanniques décident de débarquer 80 000 hommes à Gallipoli pour prendre le contrôle du secteur. Avec à leur côté, un petit bataillon de choc, celui des Sentinelles. Mais malgré leurs capacités hors normes, Taillefer, Djibouti et Pégase sont bien démunis une fois le pied posé en terre ottomane. Le feu de l’artillerie ennemie a décimé les troupes alliées pendant les opérations de débarquement, les défenses sont bien en place et un redoutable super-combattant nommé Cimeterre fait son apparition dans le camp adverse. Une fois encore, c’est une guerre de positions qui démarre et qui va miner le moral des hommes. Devant l’inefficacité des offensives, la question n’est plus de savoir quand les Ottomans vont céder, mais quand les troupes australiennes, néo-zélandaises et les trois Français seront évacués de cette plage où ils sont piégés. Mais face à l’entêtement des haut-gradés, l’heure est plutôt à la résignation, prélude au sacrifice ultime.
Les Sentinelles T4. Xavier Dorison (scénario), Enrique Breccia (dessin et couleurs), Ronan Toulhoat (couverture). Delcourt. 64 pages. 15,50 €
Les 5 premières planches :